La croissance verte, une solution ?
Site: | Moodle UVED |
Cours: | Les relations Humains-Nature(s) en anthropocène |
Livre: | La croissance verte, une solution ? |
Imprimé par: | Visiteur anonyme |
Date: | jeudi 21 novembre 2024, 11:30 |
Description
1. A propos de la séquence
Acquis d'apprentissage
- Définir la croissance verte
- Expliquer l’hypothèse sur laquelle repose la croissance verte et les éléments qui permettent de l’étayer, ou pas
- Expliciter ce qui est entendu par la post-croissance
Durée de la séquence
- 15 min
2. La notion de croissance verte et de découplage
La notion de croissance verte est apparue il y a quelques années en réponse aux critiques fortes et convergentes dont la croissance fait l'objet et reprend l'idée qu'il est possible de découpler les évolutions du PIB de ses dégâts. La question du découplage n'est pas nouvelle. Elle a été abordée à la fin des années 1980, notamment par la Banque Mondiale, avec la possibilité d'une relation entre croissance et dégradation de l'environnement en forme de U inversé. La relation postule que, dans les premiers stades de développement, l'augmentation de la production dégrade l'environnement mais, au-delà d'un certain seuil de revenu par habitant, la croissance peut entraîner une amélioration de la qualité de l'environnement. Grossman et Krueger ont proposé le nom de courbe environnementale de Kuznets. Bien que très connue, cette relation a été assez systématiquement invalidée, notamment -mais pas seulement- pour les émissions de gaz à effet de serre.
Concilier croissance et préservation de l'environnement impose de développer des processus de production plus efficaces et de produire avec moins de matière, moins d'énergie et moins de rejets polluants. L'OCDE définit la croissance verte comme la promotion de « la croissance économique et le développement tout en veillant à ce que les actifs naturels continuent de fournir les ressources et services environnementaux dont dépend notre bien-être ».
2.1. Critique de la croissance verte
Notons tout d'abord que la définition n'intègre pas la dimension sociale, à la différence du concept de développement durable. Mais, la croissance verte ne peut être envisagée comme une réponse à la crise environnementale actuelle que si elle garantit un découplage absolu, c'est-à-dire si l'usage de ressources naturelles (métaux, minéraux, combustibles fossiles, biomasse...), ou les émissions polluantes ou de gaz à effet de serre diminuent significativement de façon absolue, quel que soit le niveau de croissance économique. La plupart des travaux qui se penchent sur la question du découplage montrent que celui-ci a été au mieux relatif.
Un découplage relatif désigne une baisse de l'intensité des émissions ou matérielle du PIB : chaque euro créé se fait alors avec une quantité moins importante de matière, de rejets polluants ou d'émissions de gaz à effet de serre. Cela ne signifie pas que la quantité totale de matière utilisée diminue ou que les émissions générées décroissent.
Au niveau mondial, les prélèvements et rejets connaissent une croissance exponentielle.
Source : Commissariat général au développement durable et I4CE, 2019. Chiffres clés du climat - France, Europe et Monde, DATALAB, Edition 2019.
2.2. Quels objectifs ?
Un certain nombre d'auteurs pensent que la réduction drastique des émissions de gaz à effet de serre requise pour contenir l'élévation de la température de la planète nettement en dessous de 2°C par rapport aux niveaux préindustriels n'est plus compatible avec la croissance économique telle qu'on l'a connue durant tout le XXème siècle.
En fixant un objectif minimal d'une division par deux des émissions mondiales de CO2 à l'horizon 2050, l'économiste Michel Husson conclut par exemple qu'avec un rythme de réduction de l'intensité en CO2 de la production proche de celle que nous connaissons actuellement, l'horizon de la croissance nulle à 2050 est inévitable. Ce n'est que si l'intensité en CO2 diminuait drastiquement de 3 % par an, qu'une croissance, faible, serait envisageable (de l'ordre de +0,9% par an). Elle nécessiterait, dans ce cas, des investissements privés et publics considérables pour engager les sociétés dans une véritable transition écologique et sociale. Or, dans l'Accord de Paris, nous sommes bien au-delà d'une division par deux des émissions mondiales.
Le Haut Conseil pour le Climat (HCC) est revenu sur la question du découplage dans un rapport publié en juillet 2020 intitulé Redresser le cap, Relancer la transition. Il indique que si le découplage relatif est avéré, le découplage absolu est atteint dans très peu de cas. Pourtant le HCC indique que les modèles économiques ne permettent pas d'évaluer l'impossibilité ou la faisabilité d'une croissance découplée des émissions. Il existe des modèles qui conjuguent croissance économique et atteinte des objectifs fixés par l'Accord de Paris. Pour y parvenir, ils ont recours à des innovations technologiques de rupture, comme la bioénergie avec captage et stockage de CO2, ou la possibilité de mettre en place des évolutions de comportements importants, comme par le biais de la dématérialisation. Le HCC conclut néanmoins qu'il est improbable d'obtenir des réductions d'émissions de GES suffisantes à court terme en ne comptant que sur un découplage des émissions et du PIB : il est nécessaire de compléter de telles mesures par des mesures de sobriété et un respect strict des objectifs quantitatifs de réduction d'émissions.
3. Idées d'activités
Questions de réflexion
- Citer les différences entre la croissance verte et le développement durable ?
- Qu’est-ce qui différencie un découplage absolu et un découplage relatif ?
- Sur quoi doit porter le découplage dans le cadre d’une transition social-écologique ?
- Que révèle l’abaque proposé par Michel Husson ?
4. Ressources complémentaires
Références bibliographiques / webographiques
Ouvrages
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- Tim Jackson, "Prospérité sans croissance", De Boeck-Etopia, 2010
Article
- Haut Conseil pour le climat, 2020.
Redresser le cap, Relancer la transition
5. Crédits
Cette leçon fait partie du Socle commun de connaissances et de compétences transversales sur l'anthropocène (S3C), produit par la Fondation UVED et soutenu par le Ministère de l'Enseignement supérieur et de la Recherche.
Elle est mise à disposition selon les termes de la Licence Creative Commons - 4.0 International : Attribution - Pas d’Utilisation Commerciale - Partage dans les Mêmes Conditions
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Première édition : octobre 2023