IPAT, Kaya, mettre en équation l’impact des populations sur la biosphère

Site: Moodle UVED
Cours: Les relations Humains-Nature(s) en anthropocène
Livre: IPAT, Kaya, mettre en équation l’impact des populations sur la biosphère
Imprimé par: Visiteur anonyme
Date: samedi 21 décembre 2024, 15:29

Description

1. A propos de la séquence

Acquis d'apprentissage

  • Comprendre l’intérêt de la mise en équation des problèmes environnementaux comme outils de sensibilisation et d’appui aux politiques publiques
  • Exprimer une formulation simple des impacts environnementaux d’une population en fonction de plusieurs variables
  • Argumenter sur les leviers à disposition d’une population pour réduire ses émissions de dioxyde de carbone

Durée de la séquence

  • 20 min

2. Les équations IPAT et de Kaya


L’étude d’un phénomène ou d’une variable passe très souvent par sa modélisation ou plus simplement sa mise en équation qui peut servir à la fois à son explication et à sa quantification. Ainsi les équations IPAT et de Kaya s’intéressent à l’impact des populations sur l’environnement et aux rejets de dioxyde de carbone.

2.1. IPAT


L’équation IPAT décrit l’impact d’une population sur un territoire en le décomposant en plusieurs termes.
(Auteurs : Commoner B. , 1972, à la suite de Ehrlich P. & Holdren J. , 1971)

I = P x A x T




2.2. Kaya


L’équation de Kaya se focalise sur les émissions de CO2 d’une population, en les décomposant en plusieurs termes de manière similaire à IPAT.
(Auteur : Kaya Y., 1990)

CO2 = (CO2/Tep) x (Tep/PIB) x (PIB/pop) x pop

CO2 :

émissions de dioxyde de carbone par une population sur un territoire (jusqu’à l’échelle mondiale éventuellement) durant une période donnée (généralement par an)

Tep :

consommation d’énergie par cette population, exprimée en tonnes équivalent pétrole

PIB :

produit intérieur brut qui rend compte de la richesse produite sur le territoire par an (somme des valeurs ajoutées par le travail)

Pop :

effectif de la population, en nombre d’habitants sur le territoire

(CO2/Tep) :

niveau de pollution de l’énergie utilisée (par exemple, pour la production électrique, l’énergie hydraulique dégage environ 100 fois moins de CO2 que le charbon)

(Tep/PIB) :

efficacité énergétique de la production de richesse

(PIB/pop) :

niveau de richesse de la population

2.3. Quels enseignements tirer de ces équations simples ?


Pour réduire les impacts ou les émissions de dioxyde de carbone d’une population sur un territoire ces équations suggèrent de réduire un (ou plusieurs) terme(s) du produit.

Ce raisonnement révèle cependant des difficultés pour chaque terme des équations

  • Réduire la population pose des problèmes éthiques majeurs
  • Réduire le niveau de vie d’une population présente une acceptabilité sociale nulle et serait une mesure suicidaire pour les politiques
  • Améliorer l’efficacité énergétique des machines et des biens de consommation prend du temps, selon les avancées de la science et de la technologie, et ne doit pas s’accompagner d’une multiplication des appareils qui annulerait le bénéfice apporté par l’efficacité énergétique (effet rebond)
Sur ces différents leviers des voies d’améliorations sont constatées ou espérées, mais pour l’instant à une vitesse qui ne permet pas d’observer une réduction des émissions de CO2 mondiales par exemple.

Sources SDES, d’après EDGAR, 2020; AIE, 2021

Note : les émissions comptabilisées ici sont celles liées à la combustion d’énergie fossile et aux procédés industriels. Cela correspond au total des émissions de CO2 hors UTCATF (Utilisation des Terres, Changement d’Affectation des Terres et Foresterie). Elles représentent près de 85% des émissions de CO2 dans le monde, soit environ 65% des émissions de GES.

2.4. Atouts et limites

Atouts

Ces équations possèdent une vertu pédagogique : il s’agit d’outils qui permettent en particulier aux décideurs de mesurer l’influence des choix politiques sur la dégradation de la planète.

Elles mettent l’accent sur les leviers à activer pour limiter les impacts :

  • freiner l’augmentation de population (grâce au planning familial et à l’accès des filles aux études)
  • réduire l’accès inégal aux ressources (en incitant à la sobriété pour la consommation des classes aisées et moyennes)
  • privilégier l’utilisation d’énergie décarbonée
  • réduire l’impact environnemental des technologies (par des innovations concernant l’efficacité énergétique, les transports)

Elles permettent ainsi de tester des scénarios basés sur des modifications des modes de vie et/ou des technologies, voire de la démographie.

Limites

  • Pas de prise en compte de l’hétérogénéité de la population : le raisonnement ne porte que sur les moyennes pour les populations étudiées. En ce qui concerne les richesses par exemple, les écarts à la moyenne au sein d’une même population peuvent être considérables et la seule moyenne peut masquer une réalité complexe.
  • Pas d’intégration des effets non linéaires (seuils, catastrophes naturelles ou sanitaires par exemple, guerres, etc.)
  • Variables insuffisamment explicatives : dans une équation, un modèle, un indicateur, il convient de choisir des variables qui sont quantifiables grâce à des mesures ou des statistiques disponibles ; cependant, cela n’assure pas nécessairement un lien de causalité avec le phénomène étudié
  • Variables non indépendantes : par exemple, il est bien établi que le nombre d’enfants par femme (qui impacte la démographie) varie en fonction du PIB ; de même l’amélioration de l’efficacité énergétique s’accompagne généralement d’une augmentation des équipements (phénomène appelé effet rebond) ; il devient alors difficile d’utiliser ces équations en l’état et sans précautions pour des exercices de prospective sur l’avenir.

2.5. Exemple ciblé de l’équation de Kaya


L’usage de ce type d’équation pour travailler sur des scénarios prospectifs conduit à utiliser des identités plus spécifiques à une thématique. Par exemple dans sa réflexion pour parvenir à la neutralité carbone d’ici à 2050, l’ADEME a travaillé sur 4 scénarios ("Transition(s) 2050", Agence de l’Environnement et de la Maîtrise de l’Énergie, publié en 2021) :

  • Scénario 1 : Génération frugale
  • Scénario 2 : Coopérations territoriales,
  • Scénario 3 : Technologies vertes,
  • Scénario 4 : Pari réparateur

Pour le thème de la mobilité, l’ADEME a décomposé les émissions de CO2 liées aux transports des personnes et des marchandises de la manière suivante selon Kaya en cinq leviers :

CO₂ = Demande de transport x Report modal x Taux de remplissage x Efficacité énergétique x Intensité carbone

Ce secteur, la mobilité, est presque exclusivement dépendant du pétrole. Il doit donc impérativement et urgemment s’engager dans une transition pour limiter ses impacts sur l’environnement (effet de serre et pollutions). La décomposition en cinq leviers, conformes à la Stratégie Nationale Bas Carbone souligne que la réduction des émissions peut passer par une transformation des modes de vie et de l’aménagement du territoire (trois premiers leviers), ainsi que par une amélioration des technologies (deux derniers leviers). Les choix qui en découlent varient largement suivant les quatre scénarios de sobriété.

Image de l'ADEME illustrant les 5 leviers d'action pour la mobilité

Source : ADEME, Service Transport et mobilités, 2021


Par exemple, en ce qui concerne le levier de la demande de transports, des situations choisies ou subies, en lien avec les politiques d’aménagement des territoires influencent la fréquence et la longueur des trajets pour l’accès à l’activité professionnelle, aux soins, à l’éducation, aux services. L’attrait pour des destinations de voyage lointaines pèse aussi sur la distance parcourue. Ce levier touche aussi le transport des marchandises qui a fortement augmenté avec la mondialisation de l’économie. Il faut souligner aussi le rôle de la mondialisation des systèmes productifs, le faible du coût du transport mobilisant des énergies fossiles et l’essor du commerce international.

3. Ressources complémentaires

Références bibliographiques / webographiques

Rapport
Vidéo
  • Sébastien Ménecier, "L'équation de Kaya" (7'47), issue du MOOC UVED "Environnement et Développement durable", juin 2015.

Pour aller plus loin...

Rapport

4. Crédits

Cette leçon fait partie du Socle commun de connaissances et de compétences transversales sur l'anthropocène (S3C), produit par la Fondation UVED et soutenu par le Ministère de l'Enseignement supérieur et de la Recherche.

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Première édition :  septembre 2023