2. Les modèles alternatifs d'organisation

2.5. Géo-ingénierie et biomimétisme

Géo-ingénierie

La géo-ingénierie relève également des leviers mobilisables pour atténuer et s’adapter au dépassement des limites planétaires dont les conséquences du changement climatique. La pratique repose sur le principe que l’homme peut modifier le climat, l’environnement. Un groupe de chercheurs réunis par l’ANR (Agence Nationale de la recherche), fournit la définition suivante pour la France, publiée en 2014 :

Définition

« La géo-ingénierie de l’environnement correspond à l'ensemble des techniques et pratiques mises en œuvre ou projetées dans une visée corrective à grande échelle d’effets de la pression anthropique sur l’environnement. Il importe de bien distinguer la géo-ingénierie qui met en jeu des mécanismes ayant un impact global sur le système planétaire terrestre des techniques et pratiques d'atténuation ou ayant simplement un impact local. »Réf. biblio

La pratique de la géo-ingénierie pose l’homme en démiurge de l’environnement : il façonne l’environnement à son gré, selon ses besoins.

Parmi les technologies se rattachant à la géo-ingénierie, nous trouvons la modification des régimes des pluies, techniques pratiquées par la Chine lors des Jeux Olympiques. Une technologie proche (envoi de l’iodure d’argent dans le ciel) est aussi utilisée de longue date par les viticulteurs afin d’éviter la chute de grêlons sur leurs cultures. Cette pratique existe aux USA depuis les années 40 et pose des questions juridiques de la propriété des nuages – aujourd’hui plus de 70 pays modifient le régime des pluies en envoyant dans l’air de l’iodure d’argent. La plantation d’arbres à grande échelle pour constituer des puits de carbone s’inscrit dans le même registre.

Certains invitent à requalifier l’assèchement des marais pratiqués depuis l’antiquité comme des prémices de la géo-ingénierie. Toutefois, la différence réside dans l’ampleur de la pratique et les nombreuses inconnues quant à ses conséquences. La Terre est un système complexe, fini. Provoquer des pluies à un endroit X peut potentiellement entraîner une sécheresse en un lieu Y. Une telle approche peut relever d’une arme pour déstabiliser un Etat.

Biomimétisme

Le biomimétisme figure aussi parmi les leviers pour répondre aux enjeux actuels.

Définition

Le biomimétisme consiste à « s’inspirer des propriétés essentielles (par exemple des formes, compositions, processus, interactions) d’un ou plusieurs systèmes biologiques, pour mettre au point des procédés et des organisations permettant un développement durable des sociétés ». Il est encadré par la norme ISO 18458.

Janine Benyus, scientifique américaine et consultante en innovation, a vulgarisé et popularisé le concept, grâce à son ouvrage « Biomimicry : Innovation Inspired by Nature »Réf. biblio. En France, Il est développé au sein du CEEBIOS (Centre d’Etudes et d’Expertises en Biomimétisme). Le biomimétisme repose sur le concept que le vivant non-humain est optimal. Il a développé des stratégies, solutions efficientes, performantes et résilientes, dont l’homme peut s’inspirer. Il est un vivier pour développer de nouveaux procédés, produits, services, modèles d’organisations ou technologiques. L’échelle du vivant non-humain prise en compte va du nanométrique et biomoléculaire à l’écosystème. Il convient de distinguer 3 niveaux d’inspiration du vivant au sein du biomimétisme :

  • Le biomimétisme de forme et matières : 
    • La nageoire des baleines pour se propulser : certaines hydroliennes s’inspirent de la forme pour produire de l’énergie grâce aux vagues. 
    • La peau du requin qui réduit l’adhérence de micro-organismes : elle a été reprise pour les milieux hospitaliers afin de réduire les risques de maladies nosocomiales notamment
    • Le velcro si répandu dans nos vies quotidiennes, et qui est directement inspiré des poils recourbés sur certaines graines qui s’accrochent efficacement dans le pelage des animaux pour assurer leur dissémination
  • Le biomimétisme de propriétés : 
    • La peau des tomates est riche en lycopène : ce composé est un efficace anti-oxydant contre les UV.
  • Le biomimétisme de fonctions et de processus 
    • A l’instar de l’agroécologie ou de la permaculture, certaines techniques d’habitat répondent à cette catégorie de biomimétisme. Elles s’appuient sur la termitière notamment.

De nombreux travaux de recherche & développement sont menés afin d’identifier les diverses possibilités d’inspiration et leur transformation dans les technologies, techniques existantes et futures.

Cette vision optimale du vivant non-humain est à interroger au regard de l’ouvrage d’Olivier Hamant, « Troisième voie du vivant »Réf. biblio. Il démontre que le vivant non-humain se caractérise davantage par un fonctionnement sous-optimal, la redondance, la lenteur et l’aléatoire.