Quelles initiatives de la part de la société civile ?
Site: | Moodle UVED |
Cours: | Les modes d'action en anthropocène |
Livre: | Quelles initiatives de la part de la société civile ? |
Imprimé par: | Visiteur anonyme |
Date: | jeudi 30 janvier 2025, 06:16 |
Description
1. A propos de la séquence
Acquis d'apprentissage
- Connaître l'histoire, les rouages et les formes de contestation des associations de protection de la nature.
- Appréhender la diversité du tissu associatif en matière de préservation de l'environnement.
- Identifier les contributions possibles des associations environnementales aux projets territoriaux de développement durable.
Durée de la séquence
- 20 min
2. L'implication des organisations de la société civile
Si les États sont au cœur ou au centre des COP en tant qu’arène de négociations qui structurent la lutte contre les changements climatiques, ils ne sont pas pour autant les seuls acteurs. Au fil des COP, les organisations de la société civile (OSC) ont pris une place et une part considérable dans les négociations :
- soit en étant intégrées/insérées dans les COP aux côtés des États, en marge des négociations interétatiques
- soit en constituant leurs propres arènes.
Ces OSC, très hétérogènes, sont organisées en groupes et réseaux soulignant leur diversité. Des ONG sont associées aux fondations humanitaires, aux think tanks, aux syndicats, aux églises, aux chercheurs, etc. Les OSC s’expriment non seulement à titre individuel, mais aussi à travers les réseaux qui les représentent ou les fédèrent, par exemple le Climate Action Network, ou le réseau Climate Justice Now !
Organisations de la société civile et leurs réseaux
Source M. Tsayem Demaze. Adaptation graphique UVED
Certaines OSC et leurs réseaux, en tant qu’arènes subsidiaires (c’est-à-dire complémentaires tout en jouant un rôle secondaire) organisent des off ou des side-events (réunions, conférences, événements médiatiques, événements médiatiques, plus ou moins informels), pour médiatiser et rendre visibles des sujets spécifiques ou des angles morts des négociations (la question des forêts, celle des océans, celle des peuples autochtones, l’adaptation, la compensation, les énergies fossiles, la finance, etc.).
Structures organisant des off ou des side-events
- Institutions académiques
- Laboratoires de recherche
- Think tanks
- Agences internationales
- Organisations sociales
- Syndicats
- Agences de conseils
- ONG (nationales, voire locales ; globales ; internationales)
2.1. Evolution des mobilisations
Depuis 2015, on assiste à une évolution majeure caractérisée par une multiplication des fronts de mobilisation, avec la multiplication des actions par le bas, sur le terrain. Ceci décentre le regard par rapport à l’arène onusienne, qui, pour les OSC, n’est plus l’alpha et l’oméga, ni le cœur ou le lieu névralgique de l’orchestration de la lutte contre les changements climatiques.
La nouvelle génération d’OSC (Just Stop Oil, Fridays for future, Extinction Rébellion) mise sur la pression sur des décideurs, sur des entreprises, sur des acteurs « clés », en politisant et en radicalisant le débat, parfois sur la base des rapports du GIEC, soulignant ainsi l’importance de la prise en compte des travaux scientifiques.
Parallèlement aux actions (grèves pour le climat, blocages et sit in, coups d’éclat, etc.), d’autres organisations de la société civile, plus anciennes et/ou plus structurées, judiciarisent la lutte contre les changements climatiques, en portant plainte contre des États. C’est ce qui s’est passé par exemple en France, avec l’Affaire du Siècle, procédure judiciaire inédite engagée en 2018 contre l’État français, accusé d’inaction climatique, par quatre ONG (Notre Affaire à Tous, la Fondation pour la Nature et l’Homme, Greenpeace France et Oxfam France). Trois de ces ONG (Notre Affaire à Tous, Greenpeace France et Oxfam France) poursuivent l’action judiciaire en demandant des réparations à l’État français, reconnu coupable d’actions insuffisantes par rapport à ses engagements pour le climat.
De COP en COP, des liens et des interconnexions sont déployés entre les États, leurs coalitions et les OSC, ce qui entraine l’hybridation des arènes et des négociations, avec la circulation des concepts entre l’arène principale et les arènes subsidiaires. Les demandes de justice climatique et de compensation pour les pertes et les dommages subies par des États et des populations déjà victimes des changements climatiques ont émergé dans des arènes subsidiaires au cours des années 2000. Elles ont ensuite été prises en compte dans l’arène principale, en 2015, dans l’Accord de Paris, qui mentionne la justice climatique dans le préambule, et consacre plusieurs passages de l’Accord aux pertes et dommages.
2.2. Les autres formes de mobilisation
Les conventions citoyennes
Les conventions citoyennes sont un exemple. A la suite de la CCC (Convention Citoyenne pour le Climat) de 2021, plusieurs collectivités locales ont organisé des conventions citoyennes dans le cadre de l’élaboration de leur Plan Climat Air Énergie Territorial (PCAET).
Cependant, il importe de s’accorder et de fixer clairement le cadre de telles démarches de démocratie participative : comment seront prises en considération les propositions, comment seront-elles retenues, etc…
Les associations
Outre ce mode d’association de la société civile à l’initiative de l’autorité publique, celle-ci peut aussi s’auto-saisir d’un sujet, d’un enjeu spécifique. Ces initiatives naissent généralement d’une volonté d’actions concrètes sur le terrain au plus près des publics cibles, soit en relai de politiques publiques, soit en opposition à des politiques publiques. Parmi ces associations qui œuvrent en relai des acteurs publics, nous pouvons mentionner :
- L’association Zero Waste France, qui sensibilise à la réduction des déchets (promotion du vrac, réduction des déchets alimentaires, …).
- HOP (Halte à l’Obsolescence Programmée) milite contre l’obsolescence programmée des équipements électriques et électroniques.
Elles se font aussi critiques au regard de la politique publique, concernant le temps de l’action, les délais de mise en œuvre, de déploiement sur le terrain, de retombées objectivables et quantifiables. Cette posture peut se traduire par l’élaboration de plaidoyers, la publication de rapports, des actions en justice ou des manifestations, protestations sur un site, dans la rue. Toujours sur le sujet de l’obsolescence programmée, nous pouvons citer le rapport d’enquête de l’association HOP et sa plainte déposée concernant les imprimantes et l’application de l’indice de réparabilité. Ces rapports, parfois, se traduisent dans des lois. Ainsi, le travail de l’association HOP, sa contribution à la feuille de route sur l’économie circulaire, a contribué à la mise en place du bonus réparation. Ces associations acquièrent une certaine légitimité. Elles sont parfois associées aux travaux d’élaboration d’outils.
Les syndicats et entreprises
Il existe également des mobilisations du tissu économique telles que la CEC (Convention des Entreprises pour le Climat) de 2022, qui se décline dans les régions et sur des thématiques dédiées, ou encore le Grand défi relatif à la transition écologique de manière générale.
Dans le paysage des syndicats, un jeune syndicat se démarque par l’attention centrale qu’il porte à ces enjeux écologiques : Printemps écologique.
2.3. Conclusion
Grâce aux OSC et aux réseaux qu’elles ont constitués, la question de la justice climatique, longtemps soulevée et défendue par ces organisations, a gagné en visibilité lorsque, en 2015, elle a été mentionnée dans l’Accord de Paris. Elle n’est plus seulement traitée dans des arènes subsidiaires, mais aussi dans l’arène principale qu’est la COP. Autour de la justice climatique, la reconfiguration de la lutte contre les changements climatiques agrège plusieurs questions articulant le social et l’écologique, le global et le local, les droits humains et les droits de la nature, la réparation ou la compensation des pertes et des dommages, les alternatives ou les solutions citoyennes, etc.
Grâce aux OSC, très actives en marge des COP, la justice climatique est devenue un sujet majeur, objet de préoccupations foisonnantes mais convergentes sur la nécessité de sortir de la léthargie politique des États, pour s’attaquer à la racine du « problème climat », avec des solutions concrètes et efficaces ne reposant pas sur le capitalisme ou sur le néolibéralisme économique, ni sur les technologies, mais sur la transformation des modes de vie et de production. De nombreuses publications récentes rendent compte et analysent l’émergence de la justice climatique, soulignant notamment ses fondements moraux et philosophiques, ses repères et ses caractéristiques épistémiques, y compris ses dimensions géographiques, mais aussi l’interpellation du politique par les citoyens.
3. Idées d'activités
Jeu de plateau
- Traité ZZ : jeu de réflexion autour de l’Économie Sociale et Solidaire (perspective internationale)
4. Ressources complémentaires
Références bibliographiques / webographiques
Ouvrages
- Bourban M., 2018. Penser la justice climatique, Paris, Presses universitaires de France.
- Laigle, L., Moreau, S., 2018. Justice et environnement: les citoyens interpellent le politique. Paris, Infolio éditions.
- Morena E., 2023. Mouvements pour le climat et gouvernance climatique. Dans
Mobilisations écologiques, sous la direction de Comby J.B. et
Dubuisson-Quellier S., PUF, p.19-33.
Articles
- Tsayem Demaze M., 2023. Quête de justice climatique et reconfiguration de la lutte contre les changements climatiques en marge des conférences des parties (COP). L’Information Géographique, n°3, 2023.
Tsayem Demaze M., Philippe C., 2022. Repères et caractéristiques épistémiques de la justice climatique. Natures Sciences Sociétés, vol.30, n°1, p.14-30
Sites web
- L'Affaire du siècle, site du mouvement
- Zero Waste France, site de l'association
- HOP (Halte à l'Obsolescence Programmée), site de l'association
Pour aller plus loin...
Vidéos
- Associations, mobilisations et biodiversité : entre institutionnalisation et nouvelles formes de contestation (11'54), Luc Semal, UVED
- Vers un développement durable dans les Outre-Mer : le rôle des associations (10'27), Hubert Géraux et Thibaut Bizien, UVED
Fiche de lecture
- Fiche de lecture et questions de réflexion (PDF) sur le livre de J.Rochfled, Justice pour le Climat (2024)
5. Crédits
Cette leçon fait partie du Socle commun de connaissances et de compétences transversales sur l'anthropocène (S3C), produit par la Fondation UVED et soutenu par le Ministère de l'Enseignement supérieur et de la Recherche.
Elle est mise à disposition selon les termes de la Licence Creative Commons - 4.0 International : Attribution - Pas d’Utilisation Commerciale - Partage dans les Mêmes Conditions
Pour la formation continue ou professionnelle, les modalités d’usage sont à déterminer avec UVED et doivent faire l’objet d’un contrat définissant les conditions d’usage et de commercialisation. Contact : s3c@uved.fr
Première édition : octobre 2023
Dernière mise à jour : décembre 2023